Paupières closes

Les paupières closes, la vie continue. Privé d’informations visuelles, le cerveau se dupe lui-même et s’octroie des prolongations imagées dans un espace-temps que le scientifique qualifiera d’entoptique. Prendre conscience de ce moment particulier qu’est l’avant le noir du sommeil, dans "l’antre" paupière, est un bon moyen de révéler l’incongruité dont on fait preuve à qualifier un instant de "banal". Toute situation vécue en conscience n’est irrémédiablement "pas banale".

Ce qui saigne et vient signer par mystère
ta parole dans la litanie des forêts bleues
entre les temps anciens et l’âge nouveau
parfois dans l’instant pris pour le miracle
tu l’entrevois sous la fente des paupières
fougère violente et crue de vérité révélée
et si parfois en herbe dénouée tu respires
allant pâle et noire traverser l’air et l’eau
d’un geste éperdu vainement tu t’épuises
encore de vouloir atteindre le corps blanc
d’une autre en exil dans ton cœur éloigné
du siècle à ciel court sur de maigres élans
(...)

Un livre original où les poèmes sur papier calque font écho en transparence aux peintures d’Emmanuelle Boblet.